vendredi 28 octobre 2011

Interview exclusive : Pierre Jourde "La voix est l'un des meilleurs moyens de faire connaître et redécouvrir les textes"


- Vous étiez le parrain de la première édition et participez depuis trois ans à son organisation, pourquoi cet engagement ?

L’idée de ce festival de lecture à haute voix est apparue en commun avec Les Livreurs. Je pense en effet que la voix est l’un des meilleurs moyens de faire connaître et redécouvrir les textes à ceux qui les connaissent mal ou croient les connaître.

- Vous êtes à la fois écrivain, critique et professeur. A travers ces différents points de vue, quelle est selon vous l’importance de la lecture à haute voix ?

En tant qu’écrivain, la dimension orale est pour moi très importante, j’écris des textes pour la voix. Entendre ses propres textes permet de voir les défauts qui échappent à l’oeil. Donc en tant que critique, je m’aperçois que la voix permet de déceler ce qui fonctionne ou pas dans un texte. Du point de vue universitaire, j’insiste beaucoup sur la lecture à haute voix auprès des étudiants, qui ne savent souvent pas bien le faire. Or un texte bien lu est un texte bien compris.

- Comment avez-vous procédé pour le choix de programmation de ce troisième festival ?

C’est un choix collectif qui s’opère entre Bernhard Engel (des Livreurs), Yann Migoubert (chef du service culturel de la Sorbonne) et moi. Certains thèmes répondent à nos centres d’intérêt personnels. Par exemple on a eu beaucoup de textes dans les précédentes éditions du festival appartenant à la littérature de fin de siècle, du loufoque, ce sur quoi je travaillais.
Mais certains textes se prêtent plus aisément que d’autres à la lecture à haute voix. La première condition est en effet de pouvoir découper le texte, ce qui n’est pas toujours évident. Ainsi le roman, la chronique, l’essai libre (Philippe Muray, Vialatte) sont particulièrement représentés.
Les textes poétiques sont plus limités dans la programmation car ils sont souvent trop courts.

Au niveau des thèmes abordés cette année, cela fait longtemps que nous avions envie de faire quelque chose autour de la pornographie (ndlr : Bal à la Page thème Porno chic le 19 novembre), ce sont des textes souvent peu connus et d’une redoutable efficacité pour certains..
On a également choisi le portrait car il s’y prête très bien comme il est généralement très encadré dans le texte.
Les Récits fantaisistes permettent quant à eux de découvrir des textes surprenants, amusants, paradoxaux.
Le thème des nouveaux rebelles est particulièrement complexe. Normalement la lecture est au service du texte. Or les lectures mettront lors de cette soirée en évidence la mauvaise qualité du texte, sans toutefois lui être déloyal.

- Est-ce que vous lisez vous-même à haute voix ?

Je lis en tant qu’écrivain mes propres textes quand je suis invité, et j’en ai même enregistré certains. Je vais aussi certainement faire un spectacle de lecture à haute voix au Centre de la Voix.

- Vous êtes assez critique sur la littérature contemporaine, quelle part lui avez-vous accordé dans la programmation ?

Je pense qu’il est important de faire découvrir les contemporains, il y a quand même des choses magnifiques ! Il y a donc une part importante de littérature contemporaine dans le festival, d’autant plus que l’on fait lire chaque année un auteur contemporain, cette année il y aura Daniel Pennac, Pierre Michon, Eric Chevillard...

- Que lisez-vous actuellement ? Un conseil pour nos lecteurs ?

Si l’on s’en tient à la rentrée littéraire, deux livres ont particulièrement retenu mon attention. Tout d’abord Du domaine des murmures de Carole Martinez, récit du Moyen-Âge d’une femme emmurée vive pour échapper à un mariage qu’elle ne désirait pas. Il est à peu près dans toutes les sélections et à juste titre. Dans un style très différent, Le ravissement de Britney Spears de Jean Rolin est une fiction très amusante qui offre un portrait très drôle de la société contemporaine.


Propos recueillis par Judicaëlle Moussier

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